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Vulkam réussit une levée de fonds de 34 millions d’euros

La start-up deeptech Vulkam, près de Grenoble, est spécialisée dans les alliages d’aciers amorphes. Elle vient de lever 34 millions d’euros. Forte de 30 personnes actuellement, les effectifs devraient très bientôt passer à 35 puis 50 salariés, grâce en partie à ces fonds. Compte tenu des propriétés de ces alliages, le marché semble très prometteur. BPI France et le groupe SEB, notamment, soutiennent cette démarche.

« Vulkam entend se positionner dans le domaine de la nouvelle métallurgie » annonce d’emblée Sébastien Gravier, qui a cofondé la start-up en 2017, avec Alexis Lenain. Les fonds aideront à réaliser cet objectif ambitieux : 15 millions d’euros seront dédiés à l’usine elle-même et aux équipements. De la seconde moitié, un tiers sera déployé dans la R&D et dans les embauches.
Vulkam a développé un savoir-faire dans une technologie complexe : « elle nécessite des compétences qui se situent à l’interface de la métallurgie, de la technologie du vide et de la plasturgie » indique Sébastien Gravier. Les alliages amorphes seraient à même de « redéfinir tout ce que nous connaissons de la science des matériaux au 21è siècle » estime le dirigeant en citant les experts de la NASA. Ces alliages amorphes sont en effet exploités aux États-Unis, mais avec une approche très différente : moins qualitative, plutôt orientée vers les marchés de masse.
Sébastien Gravier, diplômé de l’Ecole Normale Supérieure-Paris Saclay, est un expert en mécanique, agrégé de conception mécanique et docteur en métallurgie. Alexis Lenain est docteur en métallurgie. Par ailleurs, Vulkam s’appuie sur 30 ans de recherche en métallurgie au sein du SIMaP, un laboratoire issu de la fusion de 3 unités de recherche du CNRS, de Grenoble INP et de l’UGA.

Propriétés exceptionnelles
Les métaux amorphes de Vulkam, les Vulkalloys®, sont des alliages dont l’organisation atomique a été modifiée, ce qui leur confère des propriétés radicalement améliorées. Alors que dans un alliage métallique classique, les atomes sont toujours organisés de façon ordonnée, dans les métaux amorphes ou « verres métalliques», ils se présentent de façon aléatoire. Cette structure désorganisée offre des propriétés inégalées en termes de dureté, de résistance à l’abrasion, comparables à celles des céramiques, mais sans être fragile.
Les alliages métalliques amorphes se différencient des métaux cristallins par leur résistance 2 à 3 fois supérieure à celle des métaux classiques. De plus, les procédés de production par thermomoulage de haute précision, développés et brevetés par Vulkam permettent de réduire drastiquement les quantités de matières premières nécessaires. Cette technique, proche de l’injection plastique ou de la fonderie sous pression, permet la fabrication directe -sans opération supplémentaire d’usinage et donc de déchets - de pièces atteignant des niveaux de précision de quelques micromètres.

Secrets de fabrication
Sébastien Gravier reste évidemment discret sur la composition des alliages, protégée par plusieurs brevets, de même que sur les procédés, également brevetés. Vulkam a déposé à ce jour deux brevets matériaux et sept brevets procédés. La chaîne de production démarre par les métaux purs : cuivre, titane, zirconium, nickel... Dosés très précisément, ils prennent la forme des lopins. Ceux-ci sont fondus à 1000 degrés C, pour être thermomoulés, un procédé à mi-chemin entre le moulage des métaux et l’injection des plastiques. Le thermomoulage de très haute précision de métaux confère leurs propriétés exceptionnelles aux matériaux.
L’une des clés de la réussite de la société réside dans le temps de refroidissement extrêmement court des lopins, l’équivalent des granules de polymère dans la plasturgie. Cette étape est cruciale pour conserver la structure amorphe des alliages. Sébastien Gravier précise que le refroidissement a lieu en près d’une seconde.

Montée en puissance
Les premiers marchés visés sont, naturellement, des marchés de niche : le médical, l’horlogerie, l’aérospatial, la joaillerie. À l’heure actuelle, Vulkam produit 34 000 lopins par an. À raison de 1 à 10 composants moulés par minute, la société peut produire 78 000 composants par an, au maximum. Mais la levée de fonds doit permettre l’industrialisation des procédés, grâce à l’usine de 3000 mètres carrés qui doit voir le jour au Versoud (Isère). Dotée d’une enveloppe globale de 15 millions d’euros (bâtiment, ligne de production, équipements), cette unité de production industrielle devra être opérationnelle en 2025 avec comme objectif la production de 2 millions de pièces dès la première année, et de 4 millions dès 2026. L’effectif de l’entreprise, composé aujourd’hui de 25 personnes dont 70% d’ingénieurs, docteurs et techniciens, doit passer à 50 personnes dans les 3 années à venir. À horizon 5 ans, Vulkam entend innover avec de nouvelles compositions de matériaux et adresser des segments de marchés comme le transport ou les sports et loisirs.

Les premiers marchés visés sont le médical, l’horlogerie, l’aérospatial, la joaillerie (crédit : Robin Pierrestiger / Vulkam).